Évolution de la formation au leadership

Évolution de la formation au leadership
Les défis des dirigeants sont-ils différents de ceux du passé ? Les fondamentaux du leadership sont-ils restés les mêmes ? Rudi Cranshoff fait le point.

Rudi Cranshoff nous parle de la 160e édition de « People management : formation au leadership »

Les défis auxquels sont aujourd’hui confrontés les dirigeants sont-ils différents de ceux du passé ou les fondamentaux du leadership sont-ils restés les mêmes ? Depuis de nombreuses années, Rudi Cranshoff, consultant et formateur professionnel chez NCOI Learning, apprend aux managers à diriger leurs collaborateurs à bon escient. Au terme de 160 éditions de la formation qui ont vu défiler une multitude de participants, il fait aujourd’hui le point sur la formation « People management : formation au leadership » et nous parle du nouveau monde du travail, de la transition du management vers le coaching et de l’élargissement de la zone de confort.

Comment la formation au leadership a-t-elle évolué au cours des dernières années ?

En réalité, les fondamentaux du programme sont restés les mêmes. La colonne vertébrale est identique, seul l’habillage évolue, ce qui n’a rien d’étonnant puisque nous sommes face à une nouvelle génération plus ouverte et plus expressive. Le nouveau monde du travail n’est pas non plus étranger à cette évolution. Le processus s’est enclenché il y a des années, mais la Covid-19 a obligé les dirigeants à le mettre en œuvre du jour au lendemain. Si le télétravail faisait à peine parler de lui jusqu’à une période récente, le curseur s’est quasiment inversé aujourd’hui. Nous allons devoir évoluer vers une forme mixte, qui modifiera le rôle du dirigeant. Par le passé, les dirigeants étaient tenus de tout planifier dans les moindres détails ; aujourd’hui, il leur faut apprendre à lâcher prise, car leurs collaborateurs deviennent de plus en plus les gestionnaires de leur propre travail.

Quelles sont les qualités qui ont pris de l’importance dans le leadership à distance ?

Le leadership situationnel, un concept des années 1980, revient au goût du jour. Il consiste à adapter son style de leadership aux collaborateurs. Car soyons réalistes : on attend d’un dirigeant qu’il fasse confiance à ses collaborateurs, mais il appartient aussi à ses collaborateurs de mériter cette confiance. S’ils sont aptes à se gérer, il faut leur laisser leur espace de liberté. Si ce n’est pas le cas, il faut être là pour les guider afin de ne pas mettre les résultats en péril. Mais un dirigeant reste avant tout un dirigeant, même s’il assume en partie le rôle de coach.

Le profil des participants a-t-il changé ?

La formation accueille davantage de femmes. Nous accueillons aussi, me semble-t-il, de plus en plus de jeunes et de personnes travaillant pour les pouvoirs publics. Cette diversité est également intéressante pour les participants qui se rendent compte, grâce aux échanges d’expériences et au partage des moments d’apprentissage, qu’ils se heurtent souvent aux mêmes obstacles. Par exemple, un participant qui travaillait pour le gouvernement a dit un jour à l’employé d’une multinationale : « Et dire que je pensais que les fonctionnaires, c’était nous ! » Ce facteur de reconnaissance est important.

Quelles sont les difficultés que rencontrent aujourd’hui les dirigeants ?

Le leadership demande du temps. J’entends souvent les dirigeants s’inquiéter de devoir en faire toujours plus avec de moins en moins de collaborateurs. Or, le coaching exige aussi du temps, et si on néglige de prendre ce temps, c’est le cercle vicieux assuré. Si, en tant que dirigeant, on n’a pas de temps à consacrer au coaching, les collaborateurs ne progressent pas. Et si les collaborateurs ne progressent pas, il faut tout faire soi-même et on n’a pas de temps à consacrer au coaching. C’est pourquoi nous encourageons les participants à sortir de ce cycle infernal. Plus vite on arrive à déléguer une partie de ses tâches, plus on a de temps à consacrer aux collaborateurs. Évidemment, c’est plus facile à dire qu’à faire…

Un dirigeant est là pour faire progresser ses collaborateurs, pas parce qu’il en sait plus que les autres
Rudi Cranshoff

Les dirigeants seront-ils un jour superflus ?

Non. Beaucoup en rêvent et le sujet fait couler beaucoup d’encre, mais fondamentalement, il faudra toujours un leader, une personne qui pourra assumer la responsabilité, par exemple, de prendre une décision alors que tout le monde n’est pas d’accord. Les entreprises sont conscientes qu’elles ne délèguent plus de la même manière aujourd’hui qu’il y a vingt ou trente ans. À l’époque, les entreprises étaient stables. Les règles étaient fixes. En tant que dirigeant, le principal souci était d’arriver à gérer les collaborateurs dans les limites imposées. Ces temps sont révolus. Un dirigeant qui continue à penser qu’il doit en savoir plus que ses collaborateurs fonce droit dans le mur. On n’est pas dirigeant parce qu’on sait tout mieux que tout le monde. On est dirigeant pour aider les collaborateurs à progresser et fédérer des individus pour former une équipe.

Les dirigeants en sont-ils suffisamment conscients ?

Beaucoup éprouvent des difficultés à cet égard, en raison d’une forme d'angoisse. Car que faire si l’informaticien en sait plus qu’eux sur les programmes et remet leur autorité en question ? Les choses évoluent très vite aujourd'hui ; les anciens se sentent talonnés par les jeunes loups aux dents longues et s’inquiètent de ce qui leur arrivera s’ils n’arrivent plus à suivre le rythme. Pourtant, en réalité, la fonction et les compétences d’un dirigeant sont totalement différentes de celle d’un employé. Au Japon, certaines sociétés ont instauré un système de mentorat, dans le cadre duquel les collaborateurs plus âgés et plus expérimentés coachent les plus jeunes. Ils leur lâchent la bride tout en étant prêts à tirer sur les rênes s’ils s’emballent, histoire de canaliser leur fougue sans les empêcher d’avancer.

Tout le monde peut-il devenir un bon manager ou est-ce essentiellement une question de talent ?

Je pense que tout le monde peut devenir un bon manager. Mais si on est naturellement porté vers les gens, cela aide évidemment. On suppose parfois – à tort – qu’une personne introvertie peut difficilement être un bon manager. Un introverti prendra davantage le temps de la réflexion avant de s’exprimer, mais il peut être, à mon sens, tout aussi capable d’assumer cette tâche qu’un extraverti. Il est important de se sentir encouragé en tant que manager et rien n’empêche, en tant que coach des collaborateurs, d’être soi-même coaché. En cas de doute, il ne faut pas hésiter à lever les yeux et à demander conseil.

Quel est votre type de leadership ?

Je ne suis pas un coach qui confronte ; ce n’est pas dans mon caractère. Je ne sors pas les gens de leur zone de confort, je préfère élargir cette zone de confort. Loin de moi l’intention de changer les gens. Nous discutons ensemble de la manière dont ils peuvent adapter leur comportement pour améliorer les choses sans pour autant perdre leur identité.

Un coach a parfois besoin d’être coaché lui-même
Rudi Cranshoff

Quand considérez-vous qu’une formation est réussie ?

Quand les participants repartent avec davantage de connaissances et de compétences qu’ils n’en avaient en arrivant. Mais le vrai défi reste à venir. La formation est relativement simple d’un point de vue théorique, mais il en va tout autrement dans la pratique. Travailler avec des collaborateurs n’est pas simple ; les choses ne sont jamais noires ou blanches et on se heurte aux structures internes. Ces quatre jours de formation donnent aux participants le temps de réfléchir à ce qu’ils font actuellement et à ce qu’ils aimeraient faire. Dès qu’ils en sortent, la course folle recommence. Je leur recommande de choisir une notion précise parmi toutes celles que nous avons abordées et de se concentrer sur sa mise en œuvre. S’ils réussissent par exemple à mener un entretien constructif avec un collaborateur réticent, j’ai atteint mon objectif. Le reste suivra.

Selon vous, comment le leadership évoluera-t-il au cours des prochaines années ?

Le leadership est un concept que l’on met actuellement à toutes les sauces. Cherchez « leadership » dans Google et vous aurez l’embarras du choix : leadership inspirant, leadership collaboratif, leadership transformationnel… Et même leadership en sifflotant ! On en galvaude le principe, car diriger consiste encore et toujours à préciser son rôle et ses attentes à l’égard des collaborateurs, à évaluer et à coacher. Toutefois, certaines choses ont changé et il convient d’en être conscient. Nous sommes ainsi passés de la notion de job description à celle d’output description. Du moment que l’employé atteint les résultats qui lui sont demandés, l’endroit, le moment et la manière dont il s’y prend importent moins. J’espère aussi que les dirigeants pourront, à l’avenir, consacrer moins de temps à la gestion afin de se concentrer davantage sur l’histoire qu’ils ont envie d’écrire et sur la façon d’y impliquer leurs collaborateurs.

Vous serez bientôt pensionné. Qu’est-ce qui vous manquera ?

Ce programme est ce qui me manquera le plus, car le retour du groupe est énorme. Le premier jour, la plupart des participants doivent prendre leurs marques. L’ambiance devient ensuite plus conviviale et les échanges plus intéressants. Je ne cesse d’apprendre au contact de mes groupes, mais je suis heureux de pouvoir terminer en beauté. J’ai eu la chance de pouvoir exercer mon métier avec passion.

Envie d’aller plus loin ?

Comment diriger vos collaborateurs à bon escient ? Comment créer un véritable esprit d’équipe ? Comment susciter la motivation et apprendre à vos collaborateurs à donner le meilleur d’eux-mêmes ? Vos outils : un bon leadership et une excellente gestion de vos collaborateurs. Cette formation de quatre jours « People management : formation au leadership » explore toutes les facettes du leadership pour peaufiner vos qualités de leader.

Biografie

Rudi Cranshoff, Tao Management, formateur depuis de nombreuses années et entre autres responsable de la formation « People management : formation au leadership » en néerlandais.

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