Facture incomplète ? Déduction TVA malgré tout

Le concept de la TVA est axé sur l’assujetti, la personne imposable. Et le terme est explicite : il s’agit essentiellement de quelque chose d’imposé, d’obligatoire. On bénéficie en échange d’un seul droit : celui de déduire la TVA. Et ce droit, nous devons pleinement l’utiliser.” Sven Reynders se réjouit donc du récent assouplissement des conditions de déduction de la TVA. 

 

Le principe de destination

“Le droit à déduction est lié à la qualité de l’assujetti à la TVA. Cela ne signifie pas pour autant que l’on peut déduire automatiquement toute la TVA. Outre quelques exceptions et limites, la loi stipule un certain nombre de conditions matérielles et formelles auxquelles il faut répondre. La principale condition matérielle est constituée par ce que l’on appelle le ‘principe de destination’. Cela signifie qu’il doit y avoir un lien avéré entre le coût ou l’investissement sur lequel vous payez une TVA d’une part et votre activité économique d’autre part”.

 

Les conditions formelles

“La condition formelle de déduction de la TVA est l’obligation de disposer de l’original d’une facture conforme. ‘Original’ est une notion complexe en cette ère de factures électroniques. La conformité implique pour sa part qu’une facture réponde à toutes les exigences pour que l’on puisse déduire la TVA. Dans l’art. 5 de l’AR 1, la loi prévoit toute une liste de mentions obligatoires. Cette liste est essentielle pour toutes les parties prenantes d’une facture, aussi bien pour celui qui l’émet que celui qui la reçoit. L’émetteur peut se voir infliger une amende s’il envoie une facture incomplète. Quant au destinataire comptabilisant une facture incomplète, il perd en principe le droit à toute déduction de la TVA.”

“Exemple : vous achetez un ordinateur pour votre entreprise mais votre numéro de TVA n’est pas mentionné sur la facture. Bien que l’on puisse parfaitement démontrer que cet achat est lié à votre activité économique, vous n’avez en principe plus le droit de déduire la TVA. Et cela peut être lourd de conséquences dans le cas de grosses dépenses. Le fisc belge s’est toujours montré très strict quant au respect de ces exigences formelles. Mais l’on a récemment constaté un glissement important en la matière.”

 

[blockquote align= »none » author= »Sven Reynders »]Nous constatons un glissement de la forme vers le contenu. Le principe de destination prédomine désormais sur la conformité de la facture. [/blockquote]

 

Décision de la Cour de justice

“En 2016, deux litiges ont été tranchés par la Cour de justice : Barlis (affaire C-516/14 du 15 septembre 2016) et Senatex (affaire C-518/14 du 15 septembre 2016). La Cour de justice y a remis en question l’attitude stricte liée aux exigences formelles. La Cour a en effet estimé que lorsque l’on répond au principe de destination et qu’on peut le démontrer à l’aide de moyens licites, on ne peut pas perdre le droit à déduction de la TVA pour le simple fait que la facture présente une lacune. Il s’agit là d’un glissement manifeste vers le principe ‘substance over form’ et je ne peux que m’en réjouir. La principale exigence est en définitive que l’achat soit lié à l’activité économique et pas le fait que la facture soit complète ou pas.”

“Comprenez-moi bien : la facture est et reste la pierre angulaire du système TVA. Et le principe de conformité n’est en aucun cas contesté. Par contre, si l’on peut démontrer que le principe de destination est respecté, le droit à déduction de la TVA ne sera plus refusé. Nous garderons évidemment cette décision de justice sous la main en cas de problème avec un contrôleur contestant le droit à déduction pour non-conformité. Il s’agit d’un deuxième moyen de recours dont nous ne disposions pas auparavant. Et cela représente malgré tout une petite révolution.”

 

L’importance de la facture

“Ce nouveau raisonnement constitue une évolution importante mais ne doit en aucun cas être interprété comme une invitation à attacher moins d’importance à la conformité de la facture. Celle-ci est et reste un document déterminant, à la fois pour l’émetteur et le destinataire. La facture fournit en effet toutes les informations relatives à la transaction et permet de vérifier si la législation en matière de TVA a bien été appliquée correctement. Elle permet aux autorités de contrôler le traitement correct d’une transaction et constitue l’objet même du droit à déduction. Des erreurs telles que l’absence de numéro de TVA ou la description lacunaire de la transaction peuvent prêter à discussion et il est en définitive toujours plus agréable, pour les deux parties, que l’ensemble du processus se déroule bien.”

 

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Sven Reynders est licencié en droit (UIA, 1993) et consultant fiscal IAB depuis 2002. Il possède par ailleurs un diplôme de troisième cycle en Corporate Finance (KUL, 2008). Après une carrière comme ‘indirect tax consultant’ auprès du Big Four, il a engrangé de l’expérience en management dans le mode de l’édition (Publishing Director Tax & Finance chez Wolters Kluwer) et au sein d’un cabinet international d’expertise comptable (Directeur régional Belgique chez Fiducial). Outre ces activités professionnelles, Sven publie aussi régulièrement des livres et des articles, tout en intervenant lors de divers séminaires, updates et journées d’étude. L’expertise de Sven couvre essentiellement les domaines suivants : general management, management reporting, impôts indirects et nouvelles technologies.

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